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30 octobre 2007 2 30 /10 /octobre /2007 09:10
martine-dessine-la-soci--t--.jpgLes couvertures de Martine ont un vrai succès, c'est ma deuxième (je parie que cela va lancer des idées à d'autres ^^).

Bon, revenons à notre sujet du jour.
Avec les Premières ES, nous avons étudié diverses structures sociales (ce qui a valu un billet sur les castes en Inde).

Après avoir analysé le concept de classe sociale chez Karl Marx et Max Weber (ce qui permet de procéder à une initiation aux grilles d'analyse sociologique), il faut se pencher sur la représentation de notre société...






 Vous connaissez cette phrase célèbre du Petit Prince ?

Alor
s, s'il te plaît, dessine moi la société...



Voyons voir... à l'évidence, ce qui vient d'abord à l'esprit, c'est la pyramide...

Ce symbole nous a permis pendant longtemps de nous forger une représentation mentale de la société.

Au départ, on a cette image en tête, elle nous obsède, et nous fascine...

social2

Puis, on se met à l'adapter à toute les sociétés.

J'avais déjà parlé des castes en Inde où la figure de la pyramide resurgissait...

Alors, on se prend à relire l'histoire de toute société jusqu'à nos jours (air connu) comme celle de la pyramide.

La féodalité et sa hiérarchie fondée sur l'honneur et le prestige social se résume à...

société pyramide 1

Puis, c'est la société d'Ancien Régime et ses ordres: noblesse, clergé et tiers état... avec ses privilèges...

les ordres


On a abolit les priviléges en 1789, cela fut même très solennel (lire ici).

Alors, l'égalité des droits -enfin proclamée- allait-elle modifier notre vision de la société ?


Avec la Révolution Industrielle, on a vu revenir nos bons "vieux schémas"...

300px-Anti-capitalism color


Et si les critères de hiérarchisation ne sont plus les mêmes, le résultat lui ...

worker.jpg


Karl Marx va théoriser cette approche pyramidale (et vous le savez, du haut de cette pyramide...).

Ce qui fera la spécificité de l'analyse marxiste, c'est qu'elle mettre l'accent sur la lutte des classes.

En effet, en raison des mécanismes de l'exploitation, le prolétariat est en lutte contre
la bourgeoisie.
Ce sont les contradictions internes au capitalisme qui précipiteront le changement social. Le grand soir consistera à abattre cette pyramide (puisque l'issue est une société sans classe...)

Le marxisme va marquer de son empreinte les sciences sociales jusque dans les années 1980.



Vous me direz que tout cela, c'est du passé (et du passé, faisons table rase ;;))

En effet, avec les Trente Glorieuses, sous l'effet d'une certaine homogénéisation des niveaux et des modes de vie, avec l'intervention économique et sociale de l'Etat (devenu "Etat-Providence"), on est passé à une autre représentation sociale

classe changement

Il y avait bien quelques penseurs (dont Alexis de Tocqueville) qui avaient pressenti un tel changement de représentation, mais ils furent dans l'ombre du marxisme alors dominant.

Cependant, dans les années 1980, certains commencent à parler de couches moyennes qui constitueraient alors le noyau central de la société française.

Redécouvrant Max Weber et Alexis de Tocqueville, des sociologues comme Henri Mendras entendent bien imposer une nouvelle représentation de la société.
Il l'annonce comme la seconde révolution française

la toupie mendras
La société est composée de constellation qui peuvent augmenter / diminuer selon les évolutions économiques et sociales. Il n'y a plus de bourgeoisie ou de prolétariat au sens marxiste, mais des catégories sociales qui connaissent une certaine fluidité sociale. Cette approche consensuelle sera dominante dans les années 1990.


Alors, on en a fini avec une approche pyramidale et conflictuelle de la société ?

Rien n'est moins sûr...

Pierre Bourdieu avait déjà élaboré une analyse qui empruntait à Karl Marx et à Max Weber, elle reposait sur une approche en termes de capital éconoque et culturelle, la lutte des classes se transformait en lutte de classement, il a montré, notamment dans la Distinction, en quoi la possession ou non de tel ou tel capital (économique, culturel, social...) et la composition globale du capital (plus de capital économique et moins de capital culturel ou l'inverse) pouvait avoir une influence sur nos goûts.
Voici ici un schéma qui résume rapidement ses résultats


470px-Espace-social-de-Bourdieu.svg.png
A partir de cette approche en termes de capital culturel et capital économique, une représentation simplifiée de notre structure sociale pouvait laisser apparaitre un autre visage

pcs


Elle ne ressemble plus à une pyramide, même si les inégalités sont représentées, elles ne conduisent pas à mettre en avant les luttes et les conflits sociaux comme Marx l'avait fait...

Pourtant, à l'heure actuelle, certains remettent en avant l'accroissement récent des inégalités entre les catégories sociales mais aussi à l'intérieur de chaque catégorie sociale.
Les "investisseurs" (qui symbolisent le capital) ont détrôné les "managers" et mis en place une main d'oeuvre précaire.
Ces dernières années, les couches moyennes pour partie ont accédé à la classe privilégiée ("les nouveaux riches", bling bling) et surtout -pour l'immense majorité- se sont peu à peu "prolétarisées": elles ont été touchées par le chômage, la précarité, la baisse du pouvoir d'achat et leur mobilité sociale aurait été freinée (thèse de Louis Chauvel voir ici).
On a donc une nouvelle représentation de la société: après la pyramide, la toupie, voici la société en sablier (Alain Lipietz 1996)...


classe-sablier.jpg

 

Nous n'avons pas épuisé toutes les représentations graphiques.
Il en reste encore une, qui est très marquée par le web 2.0 et les nouvelles technologies (hé oui, on y revient toujours ^^).

Avec la montée de l'individualisme post-moderne (cf François de Singly, l'individualisme est un humanisme ou C. MacPherson, l'individualisme possessif), les déterminants économiques et sociaux (niveau de revenu, de diplôme, l'appartenance à telle ou telle catégorie sociale...) existent mais pèsent moins qu'avant.


Cette société des individus (dont j'avais déjà parlé ici) se serait transformée en réseaux. Chaque individu choisit, selon ses affinités électives, d'appartenir à tel ou tel réseau (ce qui s'oppose aux communautés traditionnelles au sens sociologique du terme car ces dernières sont marquées par le poids des pesanteurs socio-culturelles).
Si on devait dessiner notre société, on pourrait par exemple utiliser cette image.

r--seau.gif

Quelle est alors votre représentation de la société ?
En connaissez-vous d'autres ?


La chanson a également traité ce thème: cette chanson ici illustre magnifiquement ce thème de la pyramide. Et puis comment ne pas avoir en tête ce thème lorsqu'on écoute certaines paroles de reggae ou de rap ?

Par contagion:

ceux qui aiment ces billets peuvent relire une série sur la mondialisation ici et



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commentaires

R
Bonjour,Je me suis inspiré de ton idée en demanant aux élèves de "dessiner la société" telle qu'ils la voyaient. Je l'ai fait il y a deux ans en milieu d'année et cette année en tout début d'année. Ca donnait des choses interessantes (parfois très subtiles, certains eleves retrouvant sans le savoir les inspirations de parsons ou de simmel). Ce qui était frappant c'est qu'il n''y avait aucune représentation de la société en termes de conflits mais presque toutes mettaient en avant l'idée d'indifférence entre les couches socialesEn tout cas,merci pour ton idée
Répondre
B
Je viens de trouver cette référence... <br /> <br /> Vient de paraître <br /> aux éditions L’Harmattan, dans le collection «Langue et parole»<br /> <br /> Bacot (Paul) et Rémi-Giraud (Sylvianne) éds. <br /> Mots de l’espace et conflictualité sociale <br /> <br /> ouvrage publié avec le concours du Ministère de la Recherche et des UMR 5191 et 5206<br /> <br /> avec des contributions de Nadia Allegri, Paul Bacot, Jeanne-Marie Barbéris, Denis Barbet, Louis Basset, Valérie Bonnet, Sonia Branca-Rosoff, Geneviève Calbris, Cristelle Cavalla, Georgeta Cislaru, Hugues Constantin de Chanay, Claude Cortier, Mireille Delbraccio, Hélène Desbrousses, Horst Geckeler†, Jean-Claude Guerrini, Jacques Guilhaumou, Marie Luce Honeste, Claude Labrosse, Pierre Lafon, Bernard Lamizet, Michel Le Guern, Rémi Lefebvre, María Laura Moreno Sainz, Bernard Pelloile, Hélène Pernot, Bertrand Pirat, Jean-Charles Pochard, Geoffroy Rémi, Sylvianne Rémi-Giraud, Paul Siblot et Maurice Tournier.<br /> <br /> Présentation de l’ouvrage<br /> Base et sommet, droite et gauche, en avant et en arrière, avancée et recul, Nord et Sud, Est et Ouest, France d’en haut et France d’en bas; mais aussi se soulever, se redresser, gagner du terrain, franchir la barre, faire face, descendre dans la rue; ou encore quartier, proximité, parachutage, percée, marche, progrès: innombrables sont les mots de l’espace qui servent à dire la hiérarchie et la domination, les clivages et les conflits. Qu’il s’agisse de transferts métaphoriques plus ou moins enfouis dans l’usage, ou de dénominations géographiques investies de points de vue multiples et fluctuants, ces mots nous livrent des systèmes de représentations et de valeurs complexes, dont la logique échappe à toute perception géométrique et objective de l’espace.<br /> Pour mettre en lumière l’importance de ce phénomène langagier, une trentaine de chercheurs explorent, dans un cadre pluridisciplinaire (sémantique lexicale, science politique, sociologie, histoire des idées), une grande diversité de supports: dictionnaires, lexiques, motions, journaux, biographies, œuvres littéraires, interviews, chansons… Ils montrent à quel point les mots qui disent la conflictualité sociale, en français contemporain, mais aussi dans d’autres langues (anglais, allemand, espagnol, italien) et à d’autres époques, sont indissolublement liés à une symbolique de l’espace qui, traversant une multiplicité d’expériences humaines, s’avère constitutive de notre rapport au monde, jusque dans notre activité corporelle et la profondeur de notre inconscient.
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F
Un article à la fois passionnant et ludique. Bravo !
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C
je dois avouer que rien de voir les schéma ça me rappel certains cours !!!c'est vrai que les couvertures ont du succés ^^ même à la fac lolen tout cas les cours de socio de la facs n'ont rien a voir mais j'ame de plus en plus la socio !!!
Répondre
M
L'article "espace social" en date du 7/10/2007 sur le blog de Baptiste Coulmont (http://coulmont.com/blog/) devrait vous intéresser: il porte sur la représentation plus ou moins spontanée, de l'espace social qu'ont des étudiants, en début d’année: on leur demande de dessiner la société, de représenter la société par une figure .
Répondre

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