Nous allons d'abord essayer de définir, selon les sciences sociales et politiques, le concept de démocratie.
Il est évident qu'à la question "qu'est-ce que, pour vous, la démocratie ?", beaucoup de personnes reprennent la célèbre formule:
Mais cette première approche n'est pas suffisante pour deux raisons essentielles:
- aucun régime politique n'a pu fonctionner selon ces principes;
- cette manière de définir la démocratie est un peu trop restrictive (elle cantonne la démocratie à un régime politique).
Voici toute une série de documents qui permettent de compléter et d'enrichir notre connaissance de la démocratie.
Doc.1 : Hobbes Thomas, 1588-1679, philosophe anglais : « Le Léviathan », 1651.
« Pour Hobbes, l'homme est mauvais : « l'homme est un loup pour l'homme », écrit-il, et la société inorganisée une jungle où régnera toujours le droit du plus fort.
Il faut donc préserver l'homme contre ses propres défauts en organisant la société dans laquelle il est obligé de vivre.
Pour cela, il faut confier le pouvoir à une autorité puissante qui, seule, pourra maintenir l'ordre dans l'intérêt même des citoyens.
Le moyen ? Une décision volontaire par contrat tacite. Les hommes abandonnent leur liberté, remettent la protection de leurs intérêts à cette autorité qui ne peut être que l'Etat (le Prince).
C'est donc finalement par sagesse et volonté lucide que ce contrat est conclu parce qu'il est nécessaire au maintien de la paix sociale. L'Etat est le moindre mal. Mieux vaut la souveraineté absolue de l'Etat que le risque de désordre que fait courir la liberté individuelle et égoïste car ce pouvoir absolu, qui a tous les droits, a également le devoir d?accomplir ce pour quoi il a été institué : assurer la paix sociale. »
D'après C. Cadoux, Droit Constitutionnel et institutions politiques

Doc.2 : Locke John, 1632-1704, traité du gouvernement civil, 1690.
« Les hommes étant naturellement libres, égaux et indépendants, nul ne peut être tiré de cet état, et être soumis au pouvoir politique d'autrui, sans son propre consentement, par lequel il peut convenir, avec d?autres hommes, de se joindre et s'unir en société pour leur conservation, pour leur sûreté mutuelle, pour la tranquillité de leur vie, pour jouir paisiblement de ce qui leur appartient en propre (?) »
Pour Locke, c'est pour établir une autorité commune que les hommes concluent le contrat social. Ils confèrent au corps social les pouvoirs nécessaires à la poursuite de ses fins : le bien commun et la protection des droits naturels, parmi lesquels Locke fait figurer en bonne place le droit de propriété.
De là suit que le gouvernement absolu ne saurait être légitime, ne saurait être considéré comme un gouvernement civil, car le consentement des hommes au gouvernement absolu est inconcevable.
Comment imaginer qu'on veuille se mettre dans une situation plus mauvaise que ne l'était l'état de nature (...)
Ainsi la société, héritière des hommes libres de l?état de nature, possède à son tour deux pouvoirs essentiels.
L'un est le législatif, qui règlent comment les forces d'un Etat doivent être employées pour la conservation de la société et de ses membres. L'autre est l?éxécutif qui assure l?éxécution des lois positives.
Cette institution n'est cependant pas le résultat d'un contrat, elle est un trust. Ce qui implique au minimum que le peuple peut se révolter lorsque le pouvoir n'est pas exercé conformément au trust. »
D'après J.J. Chevallier, les grandes oeuvres politiques de Machiavel à nos jours, A. Colin, 1972.

« Rousseau part d'un postulat : l'homme naît bon, c'est la société qui le corrompt.
La société politique idéale exige un ordre social qui soit fondé sur un pacte consenti volontairement par les hommes. Ce contrat social est un accord des volontés individuelles, dans lequel chacun est libre, mais se soumet à une volonté commune incarnée par l'Etat.
Il ne s'agit pas d?un contrat de gouvernement passé entre des dominants et des dominés, mais d'un contrat de chacun avec soi-même : chacun, en acceptant d'appartenir à la société, légitime le pouvoir puisque chacun détient une part de souveraineté égale et accepte en même temps de se soumettre à la loi, expression de la volonté générale.
Les caractères de la souveraineté découle de l'origine contractuelle et de la définition du souverain. Le souverain constitué par le contrat social, est le peuple édictant la volonté générale, dont la loi est l'expression. Puisque seul le souverain, qui est le peuple en corps, a qualité pour faire la loi, celle-ci ne peut être injuste. Le souverain est chacun de nous, et « nul n'est injuste envers lui-même ». aucun gouvernant ne saurait être au-dessus des lois puisque tout gouvernant est un délégué du souverain. En étant soumis aux lois, on est libre, puisqu'elles ne sont que des « registres de nos volontés »
D'après J.J. Chevallier, les grandes oeuvres politiques de Machiavel à nos jours, A. Colin, 1972.

L'idée de démocratie, on le voit, a connu tout un cheminement intellectuel avant de prendre son sens moderne. Une fois le sens des règles collectives fixées, il faut maintenant mettre en place ces principes, créer des institutions pour faire vivre ce concept...
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