
- cette entreprise a pleinement contribué à la prospérité des Trente Glorieuses (1945-1975), l'automobile étant, avec l'électroménager, le secteur économique symbolisant cette période de forte croissance;
- Renault a subi la crise des années 70-80 de plein fouet pour connaître un renouveau à la fin des années 90.

Concrètement, si on arrive à produire en utilisant moins de travail ou de capital par exemple, le processus de production sera plus productif (on peut aussi, avec les mêmes moyens produire beaucoup plus).
On le voit, il s'agit de comparer ce qui est produit (le résultat) aux moyens utilisés pour produire.
Quand on met en œuvre une innovation dans la branche automobile, on va produire par exemple plus de voitures dans le même temps de travail (mettons de 10 à 12 voitures). La productivité a donc augmenté : ces deux voitures supplémentaires sont le fruit des gains de productivité.
Les gains de productivité ne sont pas de l’argent …
Ils peuvent évidemment se transformer en argent mais ce n’est pas toujours le cas.
Parler de gains de productivité signifie simplement que la productivité a augmenté. Cela ne nous dit rien sur comment on utilise cette productivité accrue. Essayons d'appliquer cela à Renault

Production, effectifs, chiffre d’affaires
Année | Production (véhicules particuliers et petits utilitaires) | Effectifs (1) | Chiffre d'affaires (2) | |||
mondiale | domestique | mondiaux, Groupe Renault | France branche automobile | mondial, Groupe Renault | France branche automobile | |
1945 | 12 036 | 12 036 | | 23 250 | | 36 |
1955 | 219 622 | 219 622 | | 52 235 | | 1 424 |
1965 | 590 431 | 551 904 | | 62 902 | | 4 536 |
1975 | 1 391 948 | 1 128 972 | 222 436 | 103 614 | 33 539 | 18 264 |
1985 | 1 637 634 | 1 499 979 | 196 414 | 86 122 | 122 138 | 72 644 |
1995 | 1 761 643 | 1 610 216 | 139 950 | 59 264 | 184 065 | 132 050 |
2005 | 2 515 728 | 1 268 259 | | 41 338 | 39 458 | |
Source: Freyssenet, M. « Renault : 1945-2005. Production, effectifs, chiffre d’affaires, résultat net, investissement ». Édition numérique, freyssenet.com, 2006,
Notes :
(1) Les effectifs sont les effectifs au 31 décembre de l'année, y compris les salariés à contrat temporaire.
(2) Le chiffre d'affaires, le résultat net et les investissements sont en millions de francs. Le chiffre d’affaires est hors taxes à partir de 1971. En euros à partir de 2005.
Source : INSEE | 1945 | 1955 | 1965 | 1975 | 1985 | 1995 | 2005 |
SMIC horaire (en francs) | 0.78 | 1.84 | 3.14 | 7.87 | 14.75 | 37 | 52.7 |
Durée annuelle moyenne du travail | 2092 | 2168 | 1842 | 1750 | 1700 | 1680 | 1650 |
A partir de ces données, on peut réaliser différents calculs intéressants :
- la productivité physique du travail : nombre de véhicules produits / effectifs
- le prix moyen d’une Renault (en francs courants) : chiffre d’affaires / production
- le prix réel d’une Renault (en heures de travail d’un SMICARD) : prix moyen d’une Renault / SMIC horaire
| 1945 | 1955 | 1965 | 1975 | 1985 | 1995 | 2005 |
Productivité du travail (France) | 0.5 | 4.2 | 8.7 | 10.8 | 17.4 | 27.1 | 28.7 |
Prix moyen en francs courants | 2 991 | 6 484 | 8 219 | 16 177 | 48 430 | 82 000 | 107 865 |
Prix réel (en heures) | 3 834 | 3 543 | 2 617 | 20 55 | 3 283 | 2 216 | 2 046 |
Quels sont les gains de productivité des salariés français de Renault ?
En 1945, chaque travailleur produisait 0.5 voiture par an ; en 2005 28.7 voitures : autrement dit, le travailleur de 2005 est 58 fois plus efficace qu’en 1945 !!!
On s'aperçoit également que ces gains de productivité sont très importants au début (de 1945 à 1965 par exemple), puis augmentent moins vite par la suite.

Comment Renault a-t-il utilisé ces gains de productivité ?
- pour l’entreprise elle-même :
un travail plus efficace permet de baisser les coûts de production, donc d’augmenter les profits. Cela permet donc aussi de faire croître l’accumulation de capital. Effectivement, le résultat net passe de 50 millions de francs courants en moyenne dans les années 1960 à plus de 300 millions dans les années 1970. En 2000, il s'élevait à plus de 7 000 millions de francs.

- pour les travailleurs :
de 1945 à 1975 le nombre d’emplois en France de Renault a été multiplié par 4.5 (on passe de 23 000 personnes à plus de 100 000 en 1975).
Le travail étant plus efficace, il est mieux rémunéré (la hausse du SMIC est significative : de 1945 à 1975, il multiplié par 10 en monnaie courante).
De plus, le salarié de chez Renault a eu droit à des avantages sociaux importants (cinquième et sixième semaine de congés payés). Il a aussi bénéficié d’une amélioration des conditions de travail : le nombre d’accidents du travail a considérablement baissé.
Pourtant, depuis la crise économique, les effectifs France de Renault ont presque été divisés par 2.5., le SMIC a été multiplié par 6.5 en monnaie courante, la durée du travail a continué de baissé mais moins vite.
- pour le consommateur :
le prix réel d’une voiture a baissé de 46 %. En 1945, il fallait 3 834 heures de travail pour qu’un smicard puisse s’acheter une Renault neuve ; en 2005, il ne lui faut plus que 2046 heures de travail.
Pourtant, on sent bien que l'on a pas utiliser les gains de productivité de la même façon selon les époques:
- durant les Trente Glorieuses, l'entreprise et les travailleurs en ont largement profité, d'autant plus que ces derniers se sont structurés en contre-pouvoir puissant (rôle de la CGT chez Renault).
- dans la période récente, c'est plutôt l'actionnaire et le client qui bénéficie des gains de productivité.
Dès lors, on comprend bien l'enjeu des rapports de force pour le partage et l'utilisation des gains de productivité.
Si vous êtes arrivé jusqu'au bout de l'article, alors vous avez bien mérité une petite récompense: une visite virtuelle chez Renault pour voir comment l'entreprise recherche encore plus de productivité.