Quels en sont les manifestations et les principes ? Quels peuvent être les dérives de ces nouvelles méthodes d'organisation de la production ? Quelle est la situation de la France ?
Quelques sites pour comprendre le succès de Toyota:

- pour voir un film publicitaire (en anglais) sur une usine Toyota dans le Kentucky ici
- d'autres très petites vidéos sur le site de Toyota où ils illustrent le Kan ban, le jidoka, le Kaizen etc...
- le site de Toyota France où il présente eux-mêmes l'entreprise, son système de production
- le système qui va changer le monde ici: c'est le titre d'un livre qui a fait grand bruit, voici un résumé et le sommaire du livre.
- sur le lean ici, un concept de plus en plus recherché avec de bons documents.
- le site de HEC asie ici qui possède des documents passionants sur tout ce qui concerne l'Asie (en particulier la Chine)
- le site de l'université d'Evry (le GERPISA) ici sur la recherche de nouveaux modèles productifs dans l'automobile.
- voici la réaction des constructeurs français: ici le site de Renault qui met en scénario les principes du Kan Ban à travers cette animation.
Il est basé sur des pratiques d'organisation flexibles et innovantes comme les équipes autonomes, la rotation de postes, le «juste à temps », pratiques associées à une sous-traitance accrue, à la réduction des lignes hiérarchiques, à la montée en puissance des normes de qualité.
Le développement de celles-ci permet la mise en place de nouvelles configurations, et inversement.
C'est de la conjonction des deux que les entreprises attendent des gains de performance. Ce mouvement est global et s'auto-entretient en modifiant en permanence les conditions de concurrence entre entreprises et en stimulant l'innovation.
Quant on voit les performances économiques, commerciales de Toyota (qui devient le constructeur automobile de référence devant Général Motors), on comprend qu'il n'y a pas de hasard: il s'agit bien d'une stratégie de rationnalisation des processus productifs et de l'utilisation de la force de travail.
II / Quelles peuvent être les dérives de ce néo-productivisme ?
Les contraintes de rythmes et de délais se généralisent.
L'« incertitude au travail », comme le fait de devoir effectuer des tâches non prévues, augmente pour toutes les catégories de salariés, accroissant la charge mentale.
Le contrôle par la hiérarchie décline au profit d'une prescription accrue et d'un quasi doublement du contrôle informatique, concernant désormais plus du quart des salariés.
Les temps de travail sont de plus en plus éclatés. Le travail de nuit (surtout des femmes) se développe. Les horaires atypiques ou imprévisibles deviennent la norme, induisant des difficultés pour conjuguer vies privée et vie professionnelle.
Dans l'ensemble, les inégalités se creusent, risques et pénibilité augmentant davantage pour les ouvriers et les employés que pour les autres catégories.
Le Charlot des Temps Modernes pouvait certes s'ennuyer sur sa chaîne répétitive, mais seuls son corps et ses réflexes étaient mobilisés. Aujourd'hui, l'ouvrier d'une usine de découpe de canard qui doit en permanence se concentrer pour préparer et dénerver des magrets naturellement tous différents, doit mobiliser l'ensemble de ses capacités cognitives et physiques. De même, la caissière de votre hypermarché doit non seulement déplacer quotidiennement 2 tonnes de marchandises , mais aussi trouver l'emplacement de milliers de codes barres, les scanner, répondre à vos sollicitations, anticiper vos modes de paiement ou encore éviter la « démarque inconnue » (le vol).
Source: Santé au travail : l'impact des nouvelles formes de pénibilité Par Philippe Askenazy « Le Monde », le 19 décembre 2005
Ces difficultés au travail résultent principalement des choix organisationnels et technologiques des entreprises : elles sont fondamentalement collectives.
L’entreprise connaît en effet une profonde remise en cause de l’organisation du travail, liée au fait que la capacité à arriver la première sur un marché et à réagir aussi rapidement que possible aux évolutions de la demande est progressivement devenue la clef de la compétitivité.
Deux entreprises aussi réactives et compétitives l’une que l’autre peuvent traiter de manière très différente leurs salariés.
Certaines entreprises vont combiner de nouvelles formes d'organisation du travail avec des formes de désorganisation du travail (par exemples: recevoir des ordres contradictoires ou de supprimer les dialogues collectifs nécessaires à l’équilibre des équipes de travail ou à la passation des consignes).
D'autres entreprises mettent en place des innovations organisationnelles avec une meilleure formation des salariés ou des démarches de qualité de vie et de prévention au travail permettent au contraire aux organisations de devenir matures.
Dans la plupart des pays européens comme en Amérique du Nord, de nombreuses entreprises se sont efforcées de réduire l’usure au travail et d’améliorer les organisations.
Dès le début des années 1990, la question des Troubles Musculo- Squelettiques (TMS) a été soulevée:
1 / le coût croissant de l’absentéisme et des maladies professionnelles a été mis en avant sous la pression des assurances privées (pays anglo-saxons)
2 / Dans les pays nordiques, l'allongement de la vie active (suite aux réformes des retraite) a permis d'alerter les partenaires sociaux et l’Etat sur les conditions de travail des seniors.
Les Etats-Unis ou la Grande-Bretagne qui ont été les premiers à connaître une nette dégradation voient une réduction progressive de l’ordre de 4% par an des fréquences de TMS depuis maintenant une décennie, sans avoir pour autant renoncé au productivisme réactif.
En Allemagne, cela fait également 10 ans, que le nombre de cas de TMS s’est stabilisé et que, dans le même temps, l’absentéisme a reculé d’un tiers.
La France semble à la marge de cette tendance favorable. L’écart de fréquence d’accidents entre la France et la moyenne européenne se creuse. Le nombre de cas de TMS déclarés à la Sécurité Sociale progresse toujours annuellement de 20 %.
Source: Santé au travail : l'impact des nouvelles formes de pénibilité Par Philippe Askenazy « Le Monde », le 19 décembre 2005