Vous connaissez le résultat du premier tour des élections présidentielles. Je ne vais pas analyser les différents aspects déjà traités par les médias (le niveau record de participation, les résultats des différents candidats...).
Au passage, le/la prochain(e) président(e) de la République, c'est une certitude, aura passé un bac Economique et Social (Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy ont passé un bac B !)
Il s'agit de se livrer à un petit exercice de sociologie électorale à partir d'enquêtes d'opinions (sondage sortie des urnes de l'institut IPSOS voir ici).
Comme j'ai les mêmes enquêtes depuis 1988, il serait intéressant de voir les évolutions sur une plus longue durée.
Commençons, à tout seigneur, tout honneur, par celui qui apparaît comme le favori: Nicolas Sarkozy.
On retrouve, bien évidemment, les traits spécifiques d'un électorat de droite:
=> l'âge.
Alors que 25 à 26 % des français âgés de 18 à 34 ans ont voté pour Sarkozy, ils sont 41 % et 46 % des 60-69 ans et 70 ans et plus a avoir voté pour lui.
Pour caricaturer, plus on est âgé, plus la probabilité de voter à droite augmente...
=> le milieu / statut social
Traditionnellement, la droite est choisie par les travailleurs indépendants (agriculteurs, artisans, commerçants et professions libérales).
Nicolas Sarkozy réalise de très bons scores (44 % chez les artisans et commerçants).
De même, les salariés du secteur privé sont plus enclins à pencher à droite: c'est le cas puisque le candidat de l'UMP arrive en tête avec 32 % des voix de ces salariés.
=> le niveau de revenu
Plus celui-ci est élevé, plus on est enclin à voter pour un candidat de droite.
Ainsi, moins de 30 % de ceux qui ont un niveau de revenu modeste ou moyen inférieur déclarent avoir voté pour Sarkozy, ils sont 36 % parmi ceux qui ont un revenu élevé. 6 points d'écarts, c'est très important.
b / les nouveautés, les spécificités du vote Sarkozy
Pour faire ressortir l'originalité du vote en faveur de Nicolas Sarkozy, on a des éléments de comparaison: les premiers tours des élections présidentielles de 1988, 1995 et 2002.
Que retenir ?
-d'abord, c'est une évidence, les scores de Sarkozy se situent à des niveaux beaucoup plus élevés que n'importe quel des candidats de droite aux élections précédentes.
Par exemple, on a vu que l'âge est un facteur sociologique discriminant. Jacques Chirac en 1988 et en 2002 recueillait 1/3 des votes des 65 ans et plus (35 % pour Balladur en 1995) contre 41 à 46 % pour Nicolas Sarkozy en 2007.
- sur l'électorat jeune (18 à 24 ans qui sont des primo-votants en partie ou qui s'abstiennent plus souvent que les autres catégories d'âges), les scores de Sarkozy (26 %) rejoignent ceux de Chirac en 1995 (24 %). Ainsi, il n'y a pas eu un effet "repoussoir": le candidat de l'UMP a fait le plein dans les catégories habituelles, mais il a également réalisé un bon score dans d'autres catégories.
-concernant le milieu/position sociale, j'ai relevé quelques évolutions sensibles du même ordre. Sarkozy a recueilli beaucoup plus de suffrages que ses prédécesseurs depuis 1988 dans l'électorat populaire: employés et ouvriers où ils dépassent les 20 % chez les ouvriers (aucun des autres prédécesseurs ne franchissaient la barre des 15 %) et surtout chez les employés (30 % pour Sarkozy en 2007 contre 15 à 19 % chez ses prédécesseurs).
Pour les catégories étudiants et chômeurs, Sarkozy retrouve les scores de Chirac en 1995, et améliore sa base électorale traditionnelle sur les salariés du secteur privé (1 sur 3 déclare avoir voté pour Sarkozy en 2007 contre 1 sur 5 avant).
L'analyse démontre deux aspects concernant le vote en faveur de Nicolas Sarkozy.
1°) son électorat est bien celui qui vote traditionnellement à droite (plus âgé, indépendant et ayant une position sociale et un revenu aisés).
2°) mais cela ne suffirait pas à expliquer l'ampleur de son score du premier tour (plus de 30 % des votes). Il a aussi conquis d'autres électorats: les milieux populaires (employés et ouvriers), les jeunes...
On retrouve un peu la configuration qui était celle de Jacques Chirac en 1995 de ce point de vue.
Mais la principale différence, c'est qu'il s'agissait d'une thématique de gauche en 1995: la fracture sociale alors qu'en 2007, la thématique est plus droitière: autorité, travail, identité nationale...
pour prolonger:
- un peu de géographie électorale avec Pascal Perrineau voir ici
- si certains sont passés pour la première fois dans l'isoloir, ils/elles peuvent lire et relire les billets sur le secret de l'isoloir ici, là et encore ici
Dans un prochain billet, nous verrons les caractéristiques du vote en faveur de Ségolène Royal...
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