J'ai lu un billet sur un nouveau blog, celui de Louis Naugès. Il concerne une question qui me parait intéressante. Comment accueillir la N (Nous) génération ?
Une nouvelle génération, la N génération ?
Ils collaborent, partagent, maîtrisent les outils numériques, n'ont pas besoin d'assistance, découvrent eux-mêmes les nouveaux outils, les nouveaux usages....
Louis Naugès va définir cette N génération par 4 traits caractéristiques:
1 / Une soif de communication:
Leur hyper-activité les conduit à échanger en permanence et en multitâches. Ils peuvent donc à la fois être sur un chat, écouter de la musique et consulter le web. Le mail leur parait déjà désuet car trop rigide et pas assez réactif.

2 / Une autonomie à distance.
Cette génération accepte de moins en moins de se voir imposer des propositions globales. Elles préfèrent choisir elle-même ses activités, ses programmes télévisuels ou musicaux(en allant sur des sites de partage de vidéo ou de vidéo à la demande, des sites musicaux comme Pandora).
3 / Un investissement dans la création.
Cette génération crée des blogs (75 % des blogs sont crées par des moins de 25 ans selon une étude de Médiamétrie en février 2007), partagent des photos, lisent et écrivent sur wikipédia.
4 / Une mobilité à toute épreuve.
Il faut tout avoir sur soi: sa musique, ses vidéos, ses jeux, son carnet d'adresse au cas où (comme ils disent).
On peut, par ailleurs, trouver d'autres classements et d'autres critères (par exemple ici)
Il y a effectivement un changement de comportement qu'en tant enseignant nous ne pouvons que remarquer:
- dès que l'heure de cours a sonné, on se précipite sur le portable (certains le font même en classe).
- beaucoup souhaitent à la fois pouvoir bavarder, travailler, s'arrêter, continuer, être autonome et demander de l'aide (au professeur, à ses camarades...)
- C'était déjà il y a plus d'un an, j'ai calculé qu'un élève bien équipé, avec tous les appareils mobiles (Ipod, téléphone portable 3G, console PSP -si, si j'en vois de plus en plus dans les couloirs-) portait pour environ 1 500 euros de technologie sur lui.
- j'ai effectivement des élèves qui passent pas mal de temps à réaliser leur blog, d'autres m'ont rendu des diaporamas remarquables (et je sais le travail que cela peut représenter). Ce temps passé est beaucoup plus important que celui qu'ils investissent dans les révisions des cours.
- il est quasiment impossible de donner un devoir conséquent à la maison sans prendre le risque que les élèves passent un temps assez long pour trouver les réponses sur le Net.
Là où je serais beaucoup plus nuancé, c'est sur le terme de "génération" qui ne me parait pas approprié. En effet, ce ne sont pas tous les jeunes qui correspondent à ces 4 caractéristiques. J'estime leur nombre (pour le moment) à moins de 50 % des élèves que je peux connaître.
Le milieu social et culturel reste tout de même un marqueur. Louis Naugès semble un peu trop le négliger.
Quand on regarde les chiffres de la blogosphère, il faut tout de même sérieusement relativiser. Si beaucoup de blogs sont créés, combien sont alimentés régulièrement et lus, commentés ?
Mais je suis globalement plutôt en accord avec ce qu'il écrit: il y a bien de nouveaux comportements qui se sont développés chez les élèves. Et encore, nous n'en sommes qu'au début.
Sommes-nous prêts à accueillir cette N génération ?
Voici ce qu'écrit Louis Naugès:
Inutile de vous le cacher ; je suis très, mais très pessimiste sur ce point !
(...) Deux raisons principales :
- Le manque cruel de moyens, que l'on pourrait encore régler avec quelques investissements.
- Le choc culturel, beaucoup plus long et difficile à régler.
La N génération s'ennuie mortellement quand on lui présente la géographie sur une carte murale des années 50 alors qu'ils viennent de survoler leur région avec Google Earth.
La N génération ne comprend pas que leurs professeurs les condamnent au mono-tache quand ils sont en permanence multi-activités dans leur vie quotidienne.
J'avais déjà écrit quelques articles à ce sujet, notamment celui-ci.
Je n'ai pas de point de désaccord sur les arguments employés.
Par contre, je voudrais tout de même nuancer le propos pessimiste initial.
Il y a certes un fossé qui se creuse; mais:
1°) il y a aussi des prises de conscience de la part de certains collègues qui me font penser que tout n'est pas perdu loin de là. J'avais écrit un article ici qui montre que les choses commencent à avancer. Le retard peut être rattrapé: les nouvelles technologies sont beaucoup plus facilement accessibles. Il nous reste à mener une réflexion pédagogique sur leur utilisation car si nous répétons les mêmes méthodes traditionnelles aux TIC, alors effectivement nous passons à côté.
2°) Je ne crois pas qu'il faille non plus transformer tous les cours en activités multi-tâches interactives. Il y a un équilibre nouveau à rechercher.
Nous avons des compétences, nous les enseignants, qui sont très utiles pour manipuler les TIC et les informations. Comme le disait Robert Reich, nous faisons parti des manipulateurs de symboles. Savoir sélectionner l'information, élaborer une synthèse, construire des argumentations cohérentes, raisonner toutes choses égales par ailleurs...Autrement dit, nous sommes parfaitement armés pour répondre à ces nouveaux défis, nous avons des choses à dire et à enseigner à cette N Génération.
Pour garder un certain optimisme, je vous signale que ce soir, sur France 3, à 20h 50, un téléfilm sur la vie de Célestin Freinet nous permettra d'avoir des éléments de réponse à la question posée. Il me semble être un précurseur en la matière: ses TIC à lui, c'était une machine à imprimer, faire de la sérigraphie; son interactivité était fondé sur la correspondance entre les classes et l'élaboration de journaux. A nous de poursuivre le mouvement...
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