C'est le dernier billet de cette série consacrée au web 2.0. Après avoir tenté de cerner la logique de fonctionnement des sites "web 2.0" (épisode 1 et 2), nous avons pointé une première question-problème, à savoir celle de la propriété intellectuelle (épisode 3). Aujourd'hui, dernière question économique, celle de la concurrence.
Nous savons que Microsoft occupe (encore) une part dominante dans les logiciels d'exploitation. Ce qui n'est pas sans poser quelques problèmes. Et pour le web 2.0 ? La logique économique paraît être la même, pour une raison déjà évoquée, celle des externalités de réseau. Pour simplifier, disons que les deux acteurs en présence (à savoir les utilisateurs et les entreprises gérant les sites web 2.0) ont intérêt à ne pas multiplier les plateformes sous peine de perdre l'efficacité du service rendu. En effet, si on se place du côté des utilisateurs, plus l'audience du site est importante et diversifiée, plus il pourra étendre et enrichir son réseau social (audience de son blog, contacts avec d'autres utilisateurs etc...). Si on se place du côté des entreprises, l'un des moyens de se financer pour développer leur site est la publicité, qui sera d'autant mieux vendue aux annonceurs que les utilisateurs sont nombreux. Par conséquent, pour attirer le plus d'utilisateurs possibles, elles sont prêtes à proposer de multiples "services".
Là encore, partons d'un cas concret, celui de Google. Nous savons que cette entreprise est - comme Microsoft - en position dominante sur les moteurs de recherche, qu'elle a multiplié les acquisitions ces dernières années (dont celle de You Tube).
Mais que produit Google ?
A priori, la question parait simpliste: Google produit un service marchand (voir épisode 1 et 2) qui est celui du traitement de l'information avec un moteur de recherche sur le web.
La réalité est un peu plus complexe: Google propose de multiples services:
News : Alertes Google, Google News, Google Finance
Blogs et RSS : Blogger, Feedburner, Google Reader
Analyse de trafic : Google Analytics, Trends, Zeitgeist, Site Maps
Bureautique : Gmail, Docs & Spreadsheet, Calendar, Writely, Desktop, Greenborder
E-commerce : Google Checkout, Base, Froogle
Téléphonie : Dodgeball, Google Phone (en préparation), GTalk, services mobiles
Audiovisuel : Google Video, YouTube, Google Images, Picasa
Cartographie : Google Earth, Google Maps, Sketchup, Mars, Panoramio.
Il ne s'agit pas de diaboliser Google (cf Big Brother Google is watching you), mais de tenter de comprendre quelques éléments de sa stratégie face au marché.
Premier élément d'analyse, ces services permettent d'assurer les fameuses externalités de réseau en créant une convergence numérique des biens de contenus à partir de la plateforme élaborée par Google. Il n'y a là rien de bien nouveau, d'autres entreprises industrielles ont déjà réalisé des opérations de concentration dans cette optique.
Deuxième niveau d'analyse : ces services sont fournis gratuitement peuvent aussi être des produits d'appels pour gagner des utilisateurs et donc générer une audience permettant de justifier les espaces publicitaires. Pour le moment, Google n'est pas en position dominante dans toutes les activités du web (voirce graphique sur Media & Tech) , même sur le marché de la publicité on line. Mais dans certains secteurs, la position de Google est très importante. Voici les parts de marché sur les moteurs de recherche en 2006 source:webrank info
et sur les agrégateurs de flux RSS (source:Fred Cavazza)
Ces services sont distribués en dessous de leur coût (puisqu'ils sont fournis gratuitement), ce qui est aussi une stratégie qui vise à éliminer la concurrence. Pourtant, Google ne peut pas être un concurrent de Microsoft (avec sa suite office) sur le marché des suites logicielles puisqu'il ne cherche pas à y dégager des profits (contrairement à Microsoft). C'est donc que l'enjeu économique n'est pas là. Ce qui est visé par Google, c'est bien le contrôle de l'accès aux contenus informationnels.