Corrélation et causalité sont des notions très importantes en sciences sociales.
La corrélation peut se définir comme la variation simultanée de 2 variables (dans le même sens: quand l'une augmente, l'autre augmente aussi ou en sens opposé: l'une augmente alors que l'autre décroit).
La causalité désigne le fait que la variation d'une variable explique la variation d'une autre.
Voici quelques exemples assez lumineux, qui touchent aux questions des inégalités, de la cohésion sociale et du rôle de l'Etat.
Il s'agit juste d'éléments de réflexion supplémentaires par rapport à l'actualité de ces derniers jours concernant la fiscalité (je ne voulais pas, ici, rentrer dans les détails, d'autres sites / blogs l'ont abondamment commenté récemment).
Exemple n°1:
On étudie la relation entre le poids des prélèvements obligatoires et les inégalités de revenus
conclusion: la corrélation est assez évidente.
Plus le poids des prélèvements est important, plus les inégalités de revenus sont faibles (exemple: les pays du Nord de l'Europe sont très différents des Etats-Unis)
Exemple n°2:
On compare le poids des recettes publiques avec le taux de pauvreté infantile
Ici également, la corrélation est évidente:
plus le poids des recettes publiques est élevé, plus le taux de pauvreté infantile (un bon indicateur de cohésion sociale) est faible, avec les mêmes exemples.
Il y a cependant plus d'exceptions à cette corrélation que dans le premier exemple (le Japon, l'Italie ou le Royaume-Uni)
Exemple n°3:
On compare le poids de l'Etat (facteur de redistribution) avec le taux d'incarcération (utile pour estimer le degré de cohésion sociale)

Ici encore la corrélation est assez évidente...Remarquez la position "hors zone" des Etats-Unis
On peut voir l'usage que l'on peut faire de ces graphiques:
il suffit de transformer les corrélations en causalités pour légitimer le rôle de l'Etat dans la cohésion sociale.
Autrement dit, on va expliquer la faiblesse des inégalités par l'action redistributrice de l'Etat. Les graphiques, tirés d'un rapport du Conseil Economique et Social de 2005, peuvent nous conduire à tirer cette conclusion.
Il faut cependant être prudent. Pourquoi ?
Si une variable A varie dans le même sens (ou en sens opposé) que la variable B, cela ne signifie pas pour autant que les variations de B expliquent celles de A. D'autres variables (C, D, E...) peuvent également exercer une influence.
Pour en revenir à nos exemples, il est évident que les corrélations paraissent fortes, mais le danger est alors de faire croire qu'il suffit de faire monter les recettes publiques (donc les prélèvements obligatoires) pour régler la question des inégalités. Les pays scandinaves ont d'autres caractéristiques (négociation sociale, poids des syndicats, place des femmes...) qui peuvent aussi être utiles pour comprendre leur degré de cohésion sociale.
Bon, allez, je termine par deux autres corrélations qui valorisent notre métier (source: New-York Times). Quand je dis aux élèves qu'il faut étudier (lol)
Exemple n°4:

Exemple n°5:

Alors, avez-vous trouvé ? Et ne me dites pas que vous ne savez pas lire l'anglais (même moi j'y suis arrivé, c'est vous dire...).
Ces corrélations peuvent-elles être des causalités ?
Le dernier exemple n'est pas une corrélation, mais il est particulièrement lumineux, je trouve, non ? (source: New York Times)
Le graphique met en perspective les coûts annuels de la guerre en Irak avec le coût dérisoire des dépenses nécessaires pour immuniser tous les enfants du monde contre la rougeole, la coqueluche, le tétanos, la tuberculose, la polio et la diphtérie. On peut également le comparer au coût annuel de recherche contre le cancer etc.. etc... Cela dépasse l'entendement...
Parfois, lorsque corrélation et causalité sont sur le même bateau, je me demande si ce n'est pas la raison et l'humanité qui tombent à l'eau, non ?